C’est la solution donnée par le tribunal administratif de Caen dans jugement du tribunal administratif de Caen du 12 mai 2009 qui a refusé de reconnaître la qualité d’ « œuvre de l’esprit » à un Dossier de Consultation des Entreprises (DCE).
Un consultant avait assisté, dans le cadre d’un marché public « d’assistance à maîtrise d’ouvrage », une Communauté Urbaine à élaborer un DCE, en vue de la passation d’un marché relatif à l’informatisation de la gestion financière de ses services. Une autre Communauté Urbaine de Cherbourg s’est inspiré de ces travaux, et a mis en ligne dans le cadre du lancement d’un appel d’offre un DCE similaire. Le consultant a alors saisi le tribunal administratif en arguant d’une contrefaçon de ses droits d’auteurs. Il a sollicité des dommages et intérêts et la publication du jugement.
Le juge « naturel » des droits d’auteur est le juge judiciaire mais la compétence du juge administratif n’est pas exclue (tribunal des conflits, 15/10/1973) . Ce sont donc les critères dits « classiques » de répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction qui s’appliquent, à savoir notamment, pour la compétence des tribunaux administratifs, l’existence d’un service public ou l’exercice de prérogatives de puissance publique. Le consultant demandait réparation pour le préjudice subi du fait d’une faute de service de l’administration (l’atteinte supposée à ses droits d’auteurs). L’administration agissant dans le cadre de l’exercice d’un service public, le juge administratif était naturellement compétent.
Le tribunal a déterminé si le DCE était, ou non, une « œuvre de l’esprit » protégée par le droit d’auteur. La jurisprudence a défini les conditions de protection d’une œuvre de l’esprit au titre du droit d’auteur : l’ « œuvre de l’esprit » ne doit pas être la simple matérialisation d’un savoir-faire. Elle doit en outre présenter une originalité, ces deux conditions étant cumulatives. Dans une conception classique, l’originalité s’entend principalement comme le reflet de la personnalité du créateur.
En l’espèce, le tribunal relève l’existence d’un savoir-faire, mais rejette toute originalité au DCE : « il ne résulte pas de l’instruction que ce dossier ait présenté un caractère original ». Le consultant n’est donc titulaire d’aucun droit d’auteur sur le DCE. L’ensemble de ses demandes sont rejetées.
D’autres décisions sont venues rappeler la nécessité de caractériser l’originalité d’une œuvre. La cour administrative d’appel de NANCY a ainsi tranché à propos de photographies prises au microscope électronique par un arrêt du 19 mars 2009.
Une étudiant reprochait à une université d’avoir reproduit des photographies prises à l’aide d’un microscope électronique dans un ouvrage. La cour rejette toute originalité car les photographies ne sont « que la représentation objective de phénomènes biologiques, qui ne présente en elle-même aucune originalité ». L’originalité est rejetée même si les cellules photographiées ont fait l’objet d’une préparation technique préalable. En filigrane, on trouve là aussi la notion de savoir-faire, qui a été reconnu à l’étudiante, mais qui n’ouvre pas droit à la protection au titre du droit d’auteur.
Un conseil aux consultants qu’ils travaillent avec des entreprises ou des organismes publics : ne pas omettre de mentionner que les œuvres qu’ils produisent sont leur propriété. Mais même dans ce cas, pour que l’œuvre soit protégée par le droit d’auteur, encore faut-il qu’elle soit originale.
La date de publication de cet article est : 31/08/2009 . Des évolutions de la loi ou de la jurisprudence pouvant intervenir régulièrement, n’hésitez pas à nous contacter pour plus d’information.